Dans le cadre de la Semaine bio, nous avons eu le privilège de rencontrer Jean-Sébastien De Meyer, le seul artisan boulanger, pâtissier, glacier, et chocolatier certifié « Meilleur Artisan » en Belgique francophone. Son engagement en faveur de la boulangerie biologique est une véritable source d’inspiration. Apprenons-en davantage sur son parcours et sa passion pour la boulangerie biologique.
Bio c’est une question de certifications, mais il y a le bio pas cher que l’on trouve un peu partout et il a aussi un bio nettement plus qualitatif : le bio 100% nature fait à partir d’anciennes variétés de blé, uniquement des farines de meule. À l’heure actuelle, dans le domaine de la boulangerie, le bio n’est plus un critère essentiel au client. Ses premiers critères sont la qualité, la conservation du produit, le goût, le local. Le bio, c’est un plus. Cela dit, il n’y a pas de certification bio pour l’eau et le sel. Un produit certifié bio est composé au minimum de 95% de matières premières bio. En boulangerie, qu’on soit en bio ou en conventionnel, la qualité de la farine est d’une grande importance comme le choix du matériel et le savoir-faire du boulanger.
Trouver les bonnes matières premières en bio, c’est un combat de tous les jours. Quand on est vraiment passionné, et que l’on veut tout faire de A à Z c’est très compliqué. De bonnes matières premières, c’est le plus dur à trouver, en bio comme en conventionnel. Un bon beurre, une bonne crème, de bons œufs, c’est plus dur à trouver qu’un produit fini ou un produit surgelé. En bio, c’est hyper compliqué à cause des certifications. Cela dit, la certification apporte une garantie et de nombreux artisans connaissent leurs fournisseurs et leur font confiance. Les transporteurs doivent être certifiés, même les gens qui vont stocker les matières premières. Les revendeurs doivent être certifiés, tout le monde. Il y a des contrôles réguliers. Ainsi, par exemple, une entreprise de transport, de matières premières va devoir prévoir des compartiments séparés dans les camions pour la traçabilité. Voilà. Et tout cela a un coût.
Je travaille avec 3 à 4 meuniers suivant les stocks de l’un ou de l’autre, aussi bien en France qu’en Belgique.
Il est tout à fait possible de s’approvisionner localement en matières premières locales. Certains ingrédients viennent cependant de l’étranger car nous n’en produisons pas chez nous, c’est le cas des abricots séchés et graines de sésame par exemple.
Qu’est-ce qui doit être certifié, hormis les produits et les transporteurs ? L’entreprise en elle-même doit être certifiée. Il y a un cahier des charges à respecter. Ensuite, on est soumis à des contrôles réguliers sur toute la procédure de travail, la traçabilité, la gestion des commandes. Il y a des contrôles programmés et d’autres inopinés. Il y aussi des contrôles sur les produits : la farine, la pâte même.
Nous sommes contrôlés quatre à six fois par an. Autant dire que quand on achète un produit qui a une certification bio en Belgique, on est sûr que c’est bio parce qu’au niveau européen, on est le pays le plus pointu au niveau des exigences bio. Vous voulez un exemple ? Chez nous, il n’y a qu’un apiculteur certifié bio parce qu’on estime que pour faire du bio en Belgique, l’apiculteur doit garantir 50 kilomètres autour des ruches en pur bio. En France, ce n’est que cinq kilomètres.
Ça, c’est le travail du boulanger qui va le déterminer. Un boulanger peut prendre les meilleures matières premières du monde, s’il ne sait pas travailler, il ne fera rien de bon. Et j’en connais d’autres qui sont d’excellents professionnels et qui font des merveilles avec des produits de base peu qualitatifs.
Au niveau de la préparation, non. C’est au niveau de l’achat des matières premières qu’il y a une grosse différence. Il faut aussi payer pour des certifications, et ce ne sont pas de petits montants, on parle quand même de 1000 à 3 000 € par an. Finalement, c’est à cause de cela que le pain bio est plus cher, parce que sinon, il faut rappeler que pour les produits de base, les céréales, on n’a pas de dépenses de produits sanitaires, notamment. Le consommateur va donc payer son pain deux fois voire trois fois le prix du conventionnel parce qu’on sait que derrière il y a ce cahier des charges, il y a assez de surveillance, il y a un petit peu cette police du bio qui est là, derrière et qui surveille.
Pour les agriculteurs, on sait que ça peut durer des années … C’est une période de transition qui dure deux ans. Sachant que les terres ont été cultivés en conventionnel pendant un certain nombre d’années avant, il faut laisser le temps aux composés résiduels non-autorisé par le BIO pour se dégrader. Donc l’agriculteur obtient son label bio 2 ans après avoir commencé à travailler selon les règles du bio. Pour le boulanger, c’est une question de volonté. Il signe une certification, un mois après, il est sous certification parce qu’il répond au cahier des charges, il est bio. Après comme j’ai dit, le travail du boulanger est le même. C’est juste une question de volonté de passer de l’un à l’autre. Moi je suis passé au bio, parce que je voulais retrouver des farines qui sentent le grain, qui sentent le blé.
Des petits artisans qui travaillent vraiment bio sous certification, on n’est pas beaucoup. Mais bon, il y a beaucoup de boulangers qui se lancent dans le bio, mais parfois sans l’annoncer. La loi européenne est très claire : dès qu’on utilise bio, biologique et tout ce qui y est associé, il faut être certifié. Sinon c’est amende et emprisonnement. Si je ne me trompe pas, ça peut aller jusqu’à 15 000 € d’amende et six mois de prison. Et ça c’est au niveau de l’Europe.
C’est compliqué. Un boulanger conventionnel qui voudrait faire du conventionnel et du bio, va devoir avoir un deuxième atelier parce qu’on ne peut pas risquer de contaminations croisées. Une boulangerie conventionnelle doit se faire certifier pour les gammes de pains qu’elle vend d’une boulangerie certifiée.
Oui, on fait tout en pâtisserie bio. De l’éclair classique au bavarois, des pièces montées, tout ce qu’on veut. Idem pour les crèmes glacées, les pralines, les montages en chocolat… On peut tout faire. À partir du moment où on a les matières premières bio, on applique les méthodes de travail classiques de la pâtisserie.
Du 3 au 11 juin 2023, la Wallonie et Bruxelles célèbrent la 18e édition de la Semaine bio, un événement emblématique dédié à la promotion de l’agriculture biologique en Belgique francophone. Durant neuf jours, cette semaine offre l’opportunité aux consommateurs et aux professionnels de découvrir les merveilles de l’agriculture biologique wallonne, ses produits, et bien plus encore, à travers une série d’activités telles que des portes ouvertes, des conférences, des ateliers, des dégustations, et des offres promotionnelles.